Karlijn Demasure (dir.)
Se relever après l’abus sexuel
Accompagnement psycho-spirituel des survivants
Bruxelles, Lumen Vitae 2014, 104 p.
L’objectif de cette collection d’articles est double : «aider activement les victimes à se reconstruire par la rencontre de l’autre» et mettre en route des personnes qui vont «activement à la recherche de l’autre pour l’inviter à rompre le silence».
Cet ouvrage donne des clés aux thérapeutes et aux accompagnants spirituels pour leur permettre de rouvrir aux survivants les portes de la société. Le mot survivant est intentionnellement utilisé pour souligner que les victimes ont une possibilité de vivre au-delà de l’abus, en intégrant la réalité de celui-ci de telle façon qu’elle ne mortifie plus l’abusé.
Timothy Radcliffe
Chemin de croix
Paris, Cerf 2015, 132 p.
L’auteur, dominicain, a été maître de l’ordre des prêcheurs de 1992 à 2001 et s’est fait connaître internationalement par ses analyses et ses prises de position courageuses et libres, ouvertes sur la société contemporaine et enracinées dans la tradition.
La première station de son chemin de croix commence par une phrase cinglante : « Le procès de Jésus est une farce ! Pilate ne le croit pas coupable... Est-il un cynique las, qui n’a rien à faire de la vérité ? A-t-il peur des accusateurs ? » De là, l’auteur pose son regard sur notre monde où tant de gens subissent l’exécution pour des raisons semblables ! Les Noirs pauvres des Etats-Unis sont souvent condamnés à mort sans être réellement défendus par leurs avocats, qui semblent se désintéresser de leur cas. Et nous ? N’agissons-nous pas souvent ainsi, condamnant des gens sans prêter attention à ce qu’ils pensent et font réellement ?
Gabriel Ringlet
« Vous me coucherez nu sur la terre nue »
L’accompagnement spirituel jusqu’à l’euthanasie
Paris, Albin Michel 2015, 248 p.
« Vous me coucherez nu sur la terre nue. » Cette phrase de saint François, prononcée juste avant sa mort, accompagne Gabriel Ringlet dans sa solidarité avec les souffrants, jusqu’au dénuement final de la fin de vie, acceptée ou provoquée. « Prendre l’habit », « déchirer la robe », « déposer la bure », « revêtir la coule »... sont les étapes qui mènent de l’énigme au passage, en passant par l’impasse et l’apaisement.
Albert Rouet
L’échelle de la foi
Petites méditations sur la foi
Paris, Editions franciscaine 2014,174 p.
Ce livre, écrit par un Monseigneur, prédicateur, conférencier, écrivain, commence par une exclamation : « Sur la foi, autour de la foi, à propos de la foi, que d’études, de livres, de la savante théologie au roman policier, de lettres d’amour aux critiques les plus acerbes, ont été écrits ! » Et pourtant, dit l’auteur, les jardins secrets ont leurs poètes. Alors, suivons notre poète et tentons de découvrir son jardin.
Gilles Lipovetsky
De la légèreté
Paris, Grasset 2015, 372 p.
Splendide, cette fresque de la société actuelle ! Avec minutie, précision et compétence, l’auteur nous immerge dans cet univers évoluant au fil des émotions, des découvertes et de la recherche du mieux-être. Après L’ère du vide (1983), L’empire de l’éphémère (1987) et Le bonheur paradoxal (2006), nous cheminons dans le labyrinthe d’une société légère.
Pierre de Charentenay
Les Philippines. Archipel asiatique et catholique
Namur-Paris, Lessius 2015, 190 p.
Le jésuite Pierre de Charentenay trace six siècles d’histoire de l’ensemble insulaire situé au sud-ouest de la Chine que les navigateurs ibériques avaient appelé Philippines, en l’honneur du prince héritier et futur roi Philippe II d’Espagne. L’auteur a beaucoup d’affection pour ce pays - où il a résidé en 2013 - et pour ses habitants, dont il loue le caractère travailleur, conciliant, accueillant et créatif. Doués pour produire des « cultures hybrides », les Philippins ont su équilibrer leurs valeurs locales et traditionnelles avec les apports des colonisateurs successifs espagnol et américain.
Grâce à un rythme de narration animé et une information riche et documentée, l’auteur nous fait partager son amour pour ces îles. La culture et l’histoire du pays sont aussi envoûtantes que les événements survenus lors des dernières décennies sont tragiques.
Daniel Marguerat
Les Actes des apôtres (1-12) et (13-28)
Genève, Labor et Fides 2007 et 2015, 446 et 400 p.
Les Actes des apôtres, deuxième volet de l’œuvre de Luc après l’évangile, représente le grand récit des origines chrétiennes. Partant de l’Ascension du Christ et de la Pentecôte à Jérusalem, les Actes aboutissent à l’annonce de la Parole par Paul à Rome. Le monumental récit, d’abord centré sur Pierre puis sur la trajectoire de Paul, rapporte les discours de la première génération chrétienne (Pierre, Etienne, Jacques, Paul). En tout vingt-quatre discours, recomposés par Luc, et qui représentent à eux seuls un tiers du livre.
Luc a été le premier dans l’Antiquité gréco-romaine à présenter un mouvement religieux, le christianisme, par le biais d’un récit historique. La préoccupation du retard de la parousie (le retour du Christ) a laissé place chez lui à une valorisation du temps présent, le temps de l’Eglise.
Selon le bibliste vaudois Daniel Marguerat, Luc appartient à un milieu d’évangélistes prolongeant la pratique missionnaire de Paul. Les fameuses sections en « nous », qui apparaissent dans le livre à partir du passage de Paul en Macédoine (16,10) ou peut-être déjà à Antioche (11,28), feraient référence à ce groupe.
Christophe Büchi
Mariage de raison. Romands et Alémaniques. Une histoire suisse
Carouge, Zoé 2015, 464 p.
L’histoire mouvementée du ménage helvétique avait déjà fait l’objet d’une première publication en 2001 (sous la forme de la traduction française d’un original allemand) recensée par choisir. Depuis il y a eu du nouveau qui justifie une édition réactualisée.
Dans la première édition, le journaliste bilingue Christophe Büchi esquissait à grands traits quelques défis qui commençaient à bousculer la vie commune. Une cinquantaine de pages pour évoquer les questions qui, à l’époque, engrangeaient la mobilisation des citoyens des deux rives du Röstigraben. Depuis, Romands et Alémaniques se sont confrontés à d’autres défis, qui tour à tour les divisent ou les soudent.
Jonathan Z. Smith
Magie de la comparaison. Et autres essais d’histoire des religions
Genève, Labor et Fides 2014, 198 p.
Dans la préface de ce livre, Philippe Borgeaud se réjouit de la publication en français de textes de Jonathan Z. Smith, judicieusement choisis et traduits par Daniel Barbu et Nicolas Meylan. Car l’approche historienne et anthropologique de la notion de la religion par ce chercheur américain est d’une importance capitale pour tous ceux qui étudient « la religion ».
© Ed. Montparnasse6Le décès récent du philosophe et académicien français René Girard n’a pas provoqué de grandes émotions et peut de vagues, un excellent article mis à part paru dans Le Temps1. Pourtant, cet éminent penseur, né à Avignon en 1923 et mort en Californie où il a enseigné durant des décennies, a apporté un éclairage nouveau et puissant à notre compréhension du mystère du mal et de la violence collective.
Enseignant passionné de littérature, presque autodidacte, René Girard a patiemment poursuivi sa recherche hors des sentiers battus2. A partir des textes sacrés, des récits mythologiques, des livres d’histoire et de la littérature mondiale (Shakespeare, Dostoïevski, ses préférés, mais aussi C. Levy-Strauss, Nietzsche et Freud qu’il a contestés sur plusieurs points), il a fait trois découvertes majeures qui découlent les unes des autres : le désir mimétique, origine de la violence et de la rivalité ; le bouc émissaire, mécanisme de la violence collective ; la fin des sacrifices dans la Bible hébraïque et la révélation du Mal satanique dans les Evangiles.
Jean Vanier
Le corps brisé.
Retour vers la communion
Paris, Parole et Silence, 2015,177 p.
Jean Vanier, fondateur des communautés de l’Arche et de Foi et Lumière, a publié ce livre en 1986, qui a depuis été réédité à plusieurs reprises. Il a commencé à l’écrire dans la paix d’un monastère trappiste, et l’a terminé à Béthanie, en Cisjordanie, lieu de tensions, où il a été témoin de douleur, de colère, de peur, de désespoir, de maisons d’Arabes réduites en cendres. Et c’est dans le quartier musulman de la ville qu’il a ouvert une petite communauté de l’Arche.
Jacques de Guillebon, Falk van Gaver
AnarChrist ! Une histoire de l’anarchisme chrétien
Paris, Desclée de Brouwer 2015, 398 p.
Deux auteurs pour une histoire, mais une histoire où se mêlent les noms les plus divers. Parmi ceux-ci, de nombreuses figures auxquelles ni vous ni moi n’aurions spontanément accolé le qualificatif d’anarchiste. Il faut en effet se défaire totalement, avant d’aborder cet ouvrage, de toutes les images négatives que véhicule le concept ordinaire d’anarchiste. Les auteurs nous avertissent d’emblée : « Entendons-nous bien, l’anarchie [dont il s’agit ici] ce n’est pas le désordre, ni la guerre civile, ni la lutte de tous contre tous [...] L’anarchie, c’est une modification intime de la relation des hommes, une modification interne du pouvoir, une conversion du pouvoir qui se fait service - et humble service. [...] Anarchie égale liberté, et la liberté est exigeante. Autonomie, autogestion, autodiscipline, maîtrise de soi, chasteté, ascèse, simplicité volontaire, vertu, morale. L’anarchie est éminemment morale et tend au développement de la vertu personnelle - et commune. »